"Une nuit" d'Alex Lutz
Après avoir surpris la presse et le public avec le très bon Guy en 2018, l’humoriste et acteur Alex Lutz revient à la réalisation avec un film d’homme mur au regard mature et encore émerveillé sur le sentiment amoureux. On a souvent vu des films traitant d’une relation fugace de quelques heures entre deux êtres qui s’attirent et s’accordent une parenthèse.
On pense à la trilogie « before sunrise » de Richard Linklater avec Ethan Hawke et Julie Delpy. Ici Lutz va sur le même terrain mais avec ses mots, poétiques parfois, qui surprenaient beaucoup dans son dernier spectacle où il adjoignait à l’humour des pépites écrites avec en ligne de mire une prise de hauteur nostalgique sur le sens de la vie. Il poursuit donc cet exercice avec la brillante Karin Viard dans un duo de dialogues sur le couple, le sexe, les enfants, les amis. Entre ces deux êtres au coup de foudre improbable et qui ne veulent pas abandonner leur vie paisible au delà de cette nuit se jouent les premiers sentiments d’une relation, vécus délicieusement comme un cadeau improbable qu’ils pensaient ne plus jamais vivre.
La liberté qui se dégage du long métrage est touchante et l’exercice d’équilibriste délicat pour ne pas tomber dans le naif, le ridicule ou le sordide. La magie d’"Une nuit" est qu’Alex Lutz réussit tout cela avec talent. Une très bonne surprise.
La piste aux lapins :
Les filles d’Olfa
De Kaouther Ben Hania
La vie d'Olfa, Tunisienne et mère de 4 filles, oscille entre ombre et lumière. Un jour, ses deux filles aînées disparaissent. Pour combler leur absence, la réalisatrice Kaouther Ben Hania convoque des actrices professionnelles et met en place un dispositif de cinéma hors du commun afin de lever le voile sur l’histoire d’Olfa et ses filles. Un voyage intime fait d’espoir, de rébellion, de violence, de transmission et de sororité qui va questionner le fondement même de nos sociétés.
Curieux procédé choisi par la réalisatrice qui aurait pu être extrêmement bancal et auquel on s’habitue très vire. Olfa et ses deux filles restantes sumpathisent avec les actrices qui jouent les deux filles parties pour Daesh et témoignent de façon transparente de leur quotidien, de comment il a évolué oar petites touches. Et elles rejouent aussi leur rôle, ce qui aurait pu très mal passer et qui au final rend parfaitement le lien entre ces quatre femmes et les déchirements. On y jette un regard curieux de par le procédé avant de se laisser happer par l’histoire de cette Olfa plutôt rebelle et moderne, indépendante des hommes et qui n’a rien fait dans son éducation pour pousser ses filles au Djiad sauf qu’elle a voulu les protéger de la rudesse des hommes qu’elle avait elle même vécue.
Le documentaire est plutôt un docu-fiction, un film au style hybride singulier, désarçonnant et passionnant à la fois. On y parle de la condition des femmes tout autant que de l’endoctrinement par une idéologie fachiste. La parole se libère par le jeu et donne au cinéma une autre forme de catharsis que la pure fiction. Un film inattendu.
La piste aux lapins :
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