De: Maiwenn
Avec ce quotidien de la Brigade de Protection des Mineurs, Maiwenn s'attaque à des sujets sensibles que sont la pédophilie, l'inceste, le viol de mineurs, la maltraitance physique. Autrement dit, un sujet casse gueule qui peut verser très vite dans le pathos.
Maiwenn Le Besco confirme après "le bal des actrices" sont talent évident de mise en scène de personnages et de direction d'acteurs avec un naturel confondant. Karin Viard est décidément l'une des meilleures actrices de sa génération. Joey Star trouve à nouveau un rôle extrêmement touchant et charismatique, à mille lieux de l'image de la star incontrôlable qu'il fut, il est très juste. Marina Foïs enterre définitivement son image de Robin des Bois et trouve à nouveau chez Maiwenn l'occasion d'impressionner par l'incarnation qu'elle rend du personnage. Nicolas Duvauchelle, si beau mais si froid et peu original d'un rôle à l'autre, trouve enfin l'occasion de jouer autre chose. Frédéric Pierrot nous donne très envie de le revoir de toute urgence et tous les rôles de cette brigade des mœurs sont au diapason. C'est LA principale qualité du long métrage.
On s'y croirait et l'aspect pseudo documentaire fait évidemment penser au brillant "L. 627" de Bertrand Tavernier. Notamment parce que Maiwenn s'est inspirée de faits réels et que cette réalité dépasse la fiction et nous explose à la gueule dans certaines scènes déchirantes, lourdes d'émotions mais jamais de misérabilisme. Ces flics trop humains qui font face à des affaires extrêmement dures sur enfants, nous redonnent de l'humain en intraveineuse à travers leur quotidien.
Alors on peut reprocher à Maiwenn d'être une fausse modeste en créant un rôle discret pour elle-même, en observatrice photographe des policiers. Elle ne peut s'empêcher de se mettre en avant et de tomber dans le narcissisme en créant un rôle taillé pour elle, égocentré et caricatural, assez inutile et même agaçant. Allant jusqu'à nous montrer toute sa famille...sans grand intérêt pour l'histoire. Il est possible aussi de ne pas adhérer à ce patchwork d'histoires que l'on suit sans aller au bout, sous forme d'un espèce de zapping du glauque. Mais ce serait un peu se gâcher le plaisir d'un film choral très réussi, bien documenté et crédible et surtout très bien interprété, ponctué de scènes très drôles au demeurant.
Pour ma part, j'ai beaucoup aimé ce "Polisse" même si je comprend l'énervement qu'une Maiwenn peut susciter. Mais dans l'art, on ne plait pas à tout le monde et c'est tant mieux, et le moins qu'on puisse dire est qu'elle refuse de tomber dans le consensuel. Son film est violent par les mots et les situations mais il donne à voir systématiquement l'ambivalence de chacun de ces flics. Leur côté obscur, leurs contradictions, les traumas sécrétés par leur métier et le débordement de ce dernier sur leur vie personnelle, tout ceci permet d'embraser le film, de lui donner un souffle et une vigueur qui force le respect.
"Polisse" est un film qui réveille et qui ne peut laisser indifférent. Son prix du jury au dernier festival de Cannes récompense un coup de cœur et il est très mérité.
La piste aux Lapins :
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