De: Laura Wandel
Ce premier film est une réussite totale. Réussir à parler du harcèlement scolaire de façon aussi vibrante est un tour de force qui se repose sur ses jeunes acteurs incroyables, Maya Vanderbeque et Günter Duret mais aussi sur une mise en scène d'une intelligence remarquable.
En se mettant à hauteur d'enfant avec les adultes et les enfants harceleurs/bourreaux quasi hors cadre, la réalisatrice nous immerge directement dans la solitude que ressent l'enfant victime ou sa sœur de par l'isolement ressenti. Car au-delà d'être rejeté du groupe d'enfants et mis au ban, on voit toute la difficulté de la victime à parler aux adultes, à exprimer la douleur de peur d'être encore plus rejeté ou encore plus maltraité par les bourreaux. La réalisatrice montre très bien les mécanismes de mini société à l'intérieur de l'école qui s'installent et rend son sujet universel en parlant du fait que dès l'enfance, on apprend la dureté de la vie en société et la réalité de l'existence du mal à l'état le plus sauvage. On voit aussi l'aveuglement des adultes du corps enseignant qui ont tellement de sujets à traiter qu'ils préfèrent regarder ailleurs car n'arrivent pas à gérer un enfant qui ne se défend pas.
J'ai moi-même été victime de harcèlement scolaire en sixième et cinquième soit un peu plus tard en âge que l'âge des enfants dans le film. J'ai vécu un enfer durant deux ans d'humiliation permanente, étant tête de turcs de trois ou quatre connards qui avaient besoin de se défouler et de s'unifier contre plus faible. J'étais "différent" car plus sensible, plus rêveur que les autres. J'en ai pleuré et souffert à tel point que ma personnalité en été fortement imprégnée.
En adulte de 47ans je vis les petites injustices de la vie avec plus de difficultés car elles renvoient directement à ces blessures-là. Difficile d'avoir confiance en soit après celà, même 34 ans après. Et c'est rare voir inexistant qu'un film aborde ce sujet. Les enfants ne sont pas mignons. Ce sont entre eux potentiellement des monstres sans aucune retenue car ils n'ont aucune morale à cet âge. Parfois çà dure beaucoup plus longtemps.
J'ai vu toute la noirceur du monde dans les yeux de ces enfants tortionnaires et je ne peux qu'être extrêmement touché par ce film sensible d'une grande humanité qui vous prend aux tripes par sa justesse et sa simplicité.
Pour ma part j'ai mis fin au cauchemar par la violence, à coup de règle en fer sur les doigts d'un de mes tortionnaires, qui pissait le sang, le reste de la classe se mettant de mon côté. Cà aussi ceci m'a forgé en mode viking quand on m'emmerde ou me veux du mal, je frappe, symboliquement parlant. Je ne me démonte jamais pour cette raison, pour le petit bout tout gentil que j'étais et qui s'est fait détruire de cette situation.
Mais c'est triste sur la nature humaine, la nature sauvage avant d'avoir des lignes directrices, une éducation, et dans ce Nomad land d'absence de morale qu'est l'enfance, les adultes ont le devoir de surveiller, d'écouter leurs enfants dans leurs non-dits car toutes les histoires ne finissent pas bien comme la mienne.
"Un monde" est un film nécessaire, court (1h10) et brillant par son impact.
La piste aux Lapins :
Terrence Malick
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