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Photo du rédacteurBlanc Lapin

Les amours imaginaires

De: Xavier Dolan



Le pitch : amis depuis longtemps, un garçon et une fille tombent tous les deux raides dingues d'un bel éphèbe qui s'avère très sympathique mais dont ils ne savent ni l'un ni l'autre si une réelle histoire d'amour est possible avec l'un, ou l'autre.


Avec "les amours imaginaires", Xavier Dolan pouvait se planter méchamment puisque la thématique du trio amoureux est un genre ultra parcouru. Mais ce qui pouvait agacer dans son premier film se transforme ici en force. Sa fougue, sa spontanéité, son humour malicieux et le choix de ses interprètes (dont lui-même) font de cette comédie romantique une très belle réussite.

Avec sa même fraicheur, le jeune réalisateur tente de dresser une étude fine de l'amour impossible, à partir d'un vécu forcément réduit compte tenu de son âge, et c'est assez gonflé. Le film se centre sur ces situations où vous tombez amoureux d'une personne qui ne vous capte pas un instant et où vous devenez complètement obnubilé par un individu, qui devient l'unique intérêt de tout.


Un amour aveugle qui aurait pu tourner au mélo mièvre ou au film auteuriste assommant si Xavier Dolan n'avait pas eu l'idée de montrer la vision homosexuelle et hétérosexuelle de la situation, pigmentée de beaucoup de tendresse et d'ironie. Il va même jusqu'à se lâcher dans des scenettes filmant des amis en train de discourir du sexe et de l'amour dans des tirades piquantes et drôles. Et puis Dolan veut montrer qu'il sait mettre en scène, utiliser des tas de procédés appris à l'école. C'est ce qu'on lui reprochait sur "J'ai tué ma mère", d'être un peu trop nombriliste et maniéré. Quelle connerie ! Certes il aime Wong Kar Wai et ses ralentis ou même Greg Araki. Mais alors tous les réalisateurs un minimum exigeants mais qui n'inventent pas immédiatement un style propre seraient de simples poseurs. Le principe de l'art est souvent de s'inspirer des autres pour reconstruire son propre univers. Non, ici, Xavier Dolan emporte tous les spectateurs avec lui par cette allégorie des premières amours adolescentes et nous permet de sortir de la salle le sourire au coin des lèvres, complices de cette histoire simple, modeste et colorée.


Un ton et des répliques acerbes illustrent le jeu de séduction des deux amis pour conquérir le bellâtre, au risque que leur amitié en fasse le sacrifice. La cruauté de ne pas être aimé de l'autre donne lieu à de très belles scènes mélancoliques alternées d'éclats de rires dont la colorimétrie fait penser également parfois à Pedro Almodovar, grand spécialiste des amours complexes. La bande originale pop suit de manière fort classe le balancier d'espoir et de marasme que suivent les deux individus.

L'obsession amoureuse et la confusion entre fantasme et réalité est illustrée de manière épique en touchant du doigt le basculement vers le n'importe quoi pour conquérir l'autre. Pourquoi idéaliser à ce point un individu que l'on connait à peine, dont la préférence sexuelle n'est même pas identifiée? L'un des personnages des intermèdes comiques y répond à sa façon. Ce type de relation très adolescente repose sur le sentiment qu'être amoureux et conquérir l'autre est bien plus excitant au final que la vie de couple qui suit. Cette sensation de fièvre des sentiments n'est-elle pas aussi un simple reflet de nos propres égos. Une manière de se chercher une identité, de se rassurer sur ses propres possibilités. Tout du moins lorsque l'on a 20 ans...quoique...Ces amoureux cherchent d'ailleurs à séduire sur des apparences et très peu sur le fond, le relief, se caricaturant dans l'image des idoles de cinéma que leur bel éphèbe adule. Ils se grimeront ainsi en James Dean ou Audrey Hepburn, ce qui relève d'une technique de drague fort maladroite où l'individu accepte d'effacer son identité pour plaire. Comme quoi l'amour peut rendre très con, les personnages n'étant de toute évidence pas des décérébrés.


Les blessures du désir et de la déception amoureuse ont donc trouvé un bel écho chez notre petit québécois qui risque de devenir de plus en plus le chouchou des critiques tant sa rigueur de forme, de direction d'acteur, de scénario et de mise en scène semblent limpides et évidents.


La piste aux Lapins :

















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