De: Taika Waititi
Taika Waititi est un réalisateur iconoclaste, quelques peu surestimé en ce moment mais vraiment doué. Son film "Jojo Rabbit" est un très bel objet empli d'émotion et de messages salutaires sur l'acceptation de l'autre.
Il adapte la même approche que "La Vie est belle" en se mettant à hauteur d'enfant. Jojo est un petit allemand qui croit dur comme fer au nazisme et qui a comme ami imaginaire un Adolf Hitler de pacotille, aussi grotesque que nauséabond.
L'histoire aurait pu être maladroite et casse gueule et c'est la grande réussite du film que d'avoir su éviter des clichés, des facilités, et de prendre le spectateur par l'humour et l'émotion avec un dosage très fin. Forcément le film interroge de par son approche qui consiste à ridiculiser les nazis comme Chaplin le fit dans Le Dictateur. Ce n'est certes pas nouveau de vouloir se battre contre des préjugés racistes et immondes par l'humour mais ce qui inquiète davantage, c'est qu'en 2020, on trouve ceci de nouveau "original". N'a t on pas un peu perdu de notre second degré dans ce monde très puritain et très violent où les avis se confrontent ou se jugent sans aucune nuance ?
"Jojo Rabbit" a cet immense atout qu'il est désarmant de sincérité et de justesse et que même si le film n'est pas un très grand moment de cinéma, inoubliable et bouleversant, il rappelle de façon salutaire l'une des missions du septième art. Curieusement, il fait réfléchir non pas à sa thématique principale même si un bon coup sur le pif des fachos n'a jamais rien de superflu, mais il convient donc de le re-contextualiser dans notre vingtième siècle qui s'est particulièrement tendu depuis cinq ans, y compris dans les discussions et échanges de tous les jours. A tel point que certaines évidences ne le sont plus et que de plus en plus de gens trouvent çà normal ou pire, bienvenu, ou sont fatalistes devant l'arrivée de l'extrême droite au second tour d'une présidentielle. On en oublie l'historique du parti en question et tout un discours ambiant de rejet de l'autre accompagne cette montée vraiment flippante. Évidemment, ce n'est pas que français et c'est donc grave.
La normalisation de l’inacceptable est donc tournée en ridicule. Le ridicule et l'humour sont une arme imparable pour se moquer de ceux qui croient de sombres personnages, une efficacité dont "Jojo Rabbit" use avec brio.
Ce joli doigt d'honneur aux escrocs racistes qui cherchent à modeler les esprits fait tout simplement chaud au cœur. La générosité de Taika Waititi, servie par de très bons acteurs, permet au film de décoller. Le film est donc plus complexe qu'il n'y parait et cette satire pleine d'espoir vaut vraiment le coup d'être soutenue.
La piste aux Lapins :
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