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Cosmopolis

De: David Cronenberg



David Cronenberg est au top depuis 10 ans après ses excellents "History of violence", "Les promesses de l'ombre" et son passé inaperçu "A gangerous method", pourtant brillant.


Pour son nouveau film, il choisit d'adapter le roman de Don Delillo publié en 2003 avec pour star Robert Pattinson, acteur à midinettes des films Twilight, dans lesquels son personnage de vampire était totalement inexpressif au milieu de scénari proches du vide absolu.


Premier constat à la vision du film, le pari de Cronenberg et le choix qu'a fait Pattinson leur a été bénéfique mutuellement. Ils vont d'ailleurs retourner ensemble très bientôt. Pattinson est parfait dans le rôle de ce jeune milliardaire dont la vie va s'effondrer en une journée. Il est froid, blafard et juste dans le ton. Rien à redire, sa carrière est lancée chez les cinéastes qui comptent.


Cosmopolis est un film qui a surpris pas mal de critiques, tout simplement parcequ'on s’attendait à du sexe, de la violence et du Cronenberg des années 90. Or c'est plutôt le Cronenberg de Vidéodrome teinté de celui de "A dangerous method" qui nous revient. Son film est incroyablement bavard, comme sur son précèdent sur Carl Jung et Sigmund Freud. Dès lors, le spectateur se doit d'être attentif et concentré tout au long du film. Et certains discours n'ont pas forcément de sens ni de cohérence d'une scène à l'autre. Le film déroute aussi par sa quasi unité de lieu puisque ce milliardaire se rend chez son coiffeur dans sa limousine et reçoit un à un ses collaborateurs, ses maitresses, sa femme, avec qui il disserte du monde capitaliste dans lequel il vit, de sa vision du sexe, du pouvoir, de l'argent... En l'absence de lien fort entre chaque binôme et en présence d'un flot de paroles ininterrompu, sans tellement d'action, le spectateur risque de se retrouver exclu de la limousine. Ce côté abscons du long métrage, qui demande un effort qu'on fournit rarement au cinéma, laissera la moitié du public sur le bord.


Et pourtant, même si je n'ai pas tout compris, j'ai beaucoup apprécié Cosmopolis.

Après tout, qui peut se targuer, sans snobisme, de tout saisir d'un bon David Lynch ?


Mais surtout, l'important ici n'est pas tant le fond du discours, qu'on comprend assez vite, mais plutôt l'atmosphère qu'il créé. La vie de ces êtres supérieurement intelligents est morbide. Tout y est calculé au millimètre près, tout est logique, afin de ne rien laisser aux hasards de la vie. Gagner de l'argent est un jeu mais qui finit même par les lasser, par ne plus les rendre heureux, alors même qu'ils ont quitté depuis longtemps tout sens commun. A trop analyser le monde et les rapports humains comme des animaux au sang froid, pour réaliser du profit, ils ont finit par devenir des excroissances qui n'ont plus goût à rien, plus de projection possible à part une fuite en avant vers un ultra libéralisme sans bornes, sans normes, sans but que de croitre pour croitre. Allégorie pas très complexe à saisir de notre monde actuel mais message efficace.


Ce brouhaha de théories nihilistes dépeint quelques privilégiés qui évoluent lentement vers leur chute, les révoltés casseurs de ce système ultra libéral sont vus de manière peu réaliste à travers les vitres de cette limousine, de ce long corbillard qui amène le personnage de Robert Pattinson vers une mort annoncée et limite souhaitée. Cosmopolis est avant tout un film symbole de notre époque, d'un monde où la réussite et le succès ont dérapé et créé des individus totalement désensibilisés ou totalement perdus car incapables de gérer cette distanciation. Le personnage a peur de la mort mais la recherche comme une excitation, l'argent n'a pas d'importance pour lui, c'est un jeu, une logique implacable et une jouissance pure que de savoir créer de l'argent. Mais de conscience morale, d'empathie pour son prochain, il n'en n'a pas. Pour quoi faire ? Ceci ne lui apporte rien et une action doit avoir un impact immédiat. Au même titre qu'un monde où l'information circule sur la planète à la vitesse de l'éclair, sa fortune peut s'effondrer en une journée. Il est comme un joueur de roulettes dans un casino. Il vit de l'excitation de sa chute et de sa maitrise du risque. Seule la maladie peut l'emporter, dès lors il se contrôle quotidiennement par un check up. Il ne construit rien, il rejoue tout, il joue le tapis.


Quant le personnage essaie tant bien que mal de définir une relation amoureuse avec son épouse de convenance, tous les calculs mathématiques du monde n'apportent pas de solution. La naissance d'un sentiment amoureux partagé et réciproque ne se planifie pas. Tentant de s'accrocher à son passé enfantin l'espace d'une coupe de cheveux, le milliardaire golden boy retrouvera quelques minutes un sourire. Mais cette recherche perpétuelle du profit, rassurante car maitrisable, l'a rendu totalement déconnecté du monde, déconnecté de sens. Le personnage cherche donc sa mort, son assassin pour comprendre ce qui lui est arrivé, ce qui le rattacherait de nouveau à la vie. Mais l'a t il jamais su ? Cosmopolis montre les limites de cette culture du winner, cette fuite effrénée, cette peur de mourir, peur de vieillir, cette volonté de se croire immortel en s'enfermant dans cette course contre soi, mais qui finit de la même manière, sans appel vers la mort, mais seul.


Cosmopolis fait preuve d'une mise en scène et d'une direction d'acteur digne des meilleurs opus de Cronenberg mais prend le parti pris de ne pas se livrer facilement. C'est typiquement le genre de film qui vieillira peut être très bien et grandira en qualité avec les visions. Son rejet comme son adhésion n'ont d'égal que la vitalité artistique dont Cronenberg fait preuve à 69 ans.


La piste aux Lapins :



































































































































Terrence Malick

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