Sorry baby
- Blanc Lapin
- 23 août
- 2 min de lecture
De Eva Victor

Quelque chose est arrivé à Agnès. Tandis que le monde avance sans elle, son amitié avec Lydie demeure un refuge précieux. Entre rires et silences, leur lien indéfectible lui permet d'entrevoir ce qui vient après.
Avec ce premier long-métrage, Eva Victor signe une réussite à la fois devant et derrière la caméra. Elle choisit de raconter la lente réappropriation de soi après un événement brutal, un sujet grave qu’elle traite avec une étonnante légèreté de ton, ce qui créé une forme de décalage parfois étonnant.
Loin de la posture victimaire, le récit s'avère nuancé, privilégiant l’expérience intérieure sur le spectaculaire. C'est à la fois ce qui fait le charme du film et sa limite, l'émotion n'étant pas toujours autant au rendez-vous qu'on pourrait s'y attendre mais les clichés et le mélo facile étant évités avec une grande classe.
Le film suit une jeune enseignante, tentant de recoller les morceaux de son quotidien après une agression sexuelle. Ce point de départ dramatique pourrait donner lieu à un mélodrame appuyé alors que la réalisatrice/actrice choisit la retenue. Elle privilégie le tremblement discret à l’épanchement, la tension intérieure à l’explosion, préférant travailler sur les silences, les regards, les décalages voire l’humour caustique, qui provoque une forme d'inconfort.
Le personnage maladroit, bancal qu'elle incarne reflète toute la dévastation de l'agression. C'est un portrait de femme qui ne sait plus très bien comment exister dans un monde qui ne fait pas de place au chaos intérieur. En choisissant l'ambiguïté du désir d’aller mieux confronté à la complexité de passer à une autre étape de la vie, Eva Victor réussit à provoquer des sentiments diffus.
Quelques scènes tirent en longueur, et certains tics de mise en scène propres au cinéma indépendant américain — caméra tremblante, musique planante, dialogues fragmentés — peuvent agacer par leur prévisibilité. Mais l’ensemble est porté par une sincérité désarmante, qui fait oublier ces scories formelles.
Ce premier essai, à la fois pudique et audacieux, laisse présager un avenir prometteur pour cette nouvelle voix du cinéma américain.
La piste aux lapins :




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