La petite dernière
- Blanc Lapin
- il y a 5 heures
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De Hafsia Herzi

Avec La Petite Dernière, Hafsia Herzi adapte le roman de Fatima Daas et signe une œuvre sensible, sincère et remarquablement interprétée. Le film suit Fatima, une jeune femme musulmane qui découvre son attirance pour les femmes tout en cherchant à rester fidèle à sa foi. Dans ce récit d’émancipation, Herzi aborde des sujets rarement traités au cinéma français — la religion, le désir, la honte et la liberté — avec une pudeur et une douceur désarmantes.
La force du film réside dans cette retenue. Rien n’est crié, rien n’est démonstratif. Herzi observe son héroïne dans les petits gestes du quotidien, dans les silences, dans ces moments suspendus où la parole ne suffit plus. La réalisatrice refuse tout pathos et filme avec une bienveillance rare les tiraillements d’une femme prise entre deux mondes : celui de la foi et celui du désir. Cette délicatesse, loin d’affaiblir le propos, en renforce la sincérité.
Nadia Melliti, révélation du film, habite le rôle et elle est de tous les plans. Son jeu, à la fois physique et intérieur, porte tout le film. Elle incarne avec justesse cette quête identitaire silencieuse, cette lutte intime pour exister sans trahir ni soi ni les autres. Son prix d’interprétation à Cannes apparaît pleinement mérité tant elle confère au film sa vérité émotionnelle.
Mais si la mise en scène séduit par sa sobriété et son humanité, elle souffre aussi de sa mesure. À force de vouloir éviter tout effet, le film s’étire parfois, perd en rythme et en tension dramatique. Certaines séquences paraissent redondantes, comme si Herzi craignait de conclure trop vite un parcours intérieur qu’elle a pourtant si finement esquissé. On aurait aimé la voir pousser plus loin son récit : montrer comment cette jeune femme transforme son éveil en véritable émancipation, ce qu’elle fait de cette liberté nouvellement conquise.
Ce léger manque de résolution n’enlève rien à la beauté du film, mais laisse un sentiment d’inachèvement — comme si le chemin s’interrompait juste avant la lumière. La Petite Dernière reste pourtant une œuvre importante : un film rare, humble et nécessaire, qui parle d’identité, de foi et de désir sans éclats ni dogmes. Hafsia Herzi y confirme sa sensibilité de cinéaste et livre un film profondément humain, et fera date dans le cinéma queer.
La piste aux Lapins :




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