De: Leyla Bouzid
Quelle superbe découverte que ce second film de la réalisatrice Leyla Bouzid, d'une délicatesse pour ses personnages qui vise très juste et vous emportera à coup sûr
Il est question de désir et d'amour pour de jeunes gens d'aujourd'hui, issus de culture musulmane, l'une étant étudiante tunisienne à Paris et le garçon un fils d'intellectuel algérien devenu chômeur en France quand ils ont immigré.
Mais le film ne porte pas de jugements et donne une vision de nouveau plu-ri culturelle de la cité, qui rappelle la réussite récente de "Gagarine". En effet, on y parle d'êtres humains cultivés, liés entre eux par un quotidien certes pauvre et en cité mais le film donne un regard plus adulte et moins caricatural que ce que les médias et surtout les politiques populistes caricaturent.
Avec ce jeune garçon interprété avec grâce et sensibilité par Sami Outalbali, une vraie révélation, la réalisatrice donne une autre image du mâle musulman typé. Ahmed est cultivé, il aime les lettres, il est doux et surtout incroyablement respectueux de la femme. Il est romantique, oh combien romantique. Le film explique l'impact de la culture sur ce comportement qui semble très introverti par rapport à la liberté sexuelle des jeunes de son âge. Ce jeune homme idéaliste n'a pas perdu son pucelage et on va l'accompagner dans son éclosion. Il est touchant, parfois agaçant d'hésitation mais souvent le spectateur le porte, la réalisatrice nous collant en plans serrés à ce visage encore juvénile et ébloui par la beauté de cette jeune femme qu'il veut conquérir.
Il veut prendre son temps, il est idéaliste et çà fait un bien fou de voir un personnage comme cela, auquel vous penserez longtemps après la séance.
Face à lui, l'excellente Zbeida Belhajamor interprète cette tunisienne libérée qui est plus occidentale culturellement que son amoureux transi. Elle ne sait comment réagir, il lui plait, elle veut croquer la vie tout de suite, elle le désire mais lui se refuse. Les rôles sont inversés par rapport aux clichés, c'est l'homme qui se défile, se faufile, par peur, parce que passer le pas lui semble un obstacle impossible à franchir.
"Une histoire d'amour et de désir" est un très beau film sur la perte de l’innocence, la fin de l'enfance pour se jeter dans le grand bain. Mais c'est surtout un film très poignant et mignon dans tous les sens non péjoratifs du terme. On est touchés, émus par cette sensibilité exprimée avec autant de grâce.
La piste aux Lapins :
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