De Sean Durkin
Les inséparables frères Von Erich ont marqué l’histoire du catch professionnel du début des années 80. Entrainés de main de fer par un père tyrannique, ils vont devoir se battre sur le ring et dans leur vie. Entre triomphes et tragédies, cette nouvelle pépite produite par A24 est inspirée de leur propre histoire.
Le réalisateur de l'excellent The Nest avec Jude Law revient avec une nouvelle réussite dans laquelle Zac Efron et Harris Dickinson (Sans filtres) cassent leur image.
Efron trouve son meilleur rôle, totalement transformé en monstre de bodybuilding et d'une sobriété confondante. Harris Dickinson, Jeremy Allen White,Stanley Simons sont d'une grande justesse face au monstre que joue Holt McCallan, en père tyrannique dont l'égo et l’obsession que son clan et lui à travers son clan devienne une star. Le film aurait pu tomber dans la pathos tant cette famille a vécu des drames justes hallucinants mais Sean Durkin n'a pas besoin d'appuyer le trait tant l'histoire est bluffante. Au contraire, il fait preuve d'une grande finesse en ne montrant pas certaines scènes pour mieux filmer le sol qui se dérobe sous les pieds du personnage d'Efron, juste en regardant son corps bodybuildé incapable d'agir sur son père et sur les évènements et en filmant de près son regard perdu.
Car le personnage comme ses frères ont été dressés comme des bêtes tout leur vie et entre catholicisme hardcore et un respect puissant pour la virilité et l'ascendance paternelle. Ils sont prêts à sacrifier leur vie aveuglément. En niant toute identité à chacun d'eux, ce père se construit un idéal de famille américaine, qui bouffe de la viande et des protéines et fait de la muscu à mort ou s'offre des flingues à Noël. La caricature d'une certaine forme d'Amérique qui vote Trump aujourd'hui, mais une Amérique sincère dans ses convictions et ses repères. On y voit ainsi tout l'aveuglement d'un american way of life où il faut être le plus fort, le plus testostéroné, jusqu'à y perdre l'essentiel et à fragiliser tout l’édifice, particulièrement friable.
Cette Amérique du show, ce catch qui est à la fois du sport et de la mise en spectacle, n'est jamais regardée avec condescendance. Le réalisateur n'insiste pas sur le côté truqué des matchs. Il préfère se focaliser sur les blessures et tortures que s'infligent à leurs corps ces personnages au nom d'un gourou aveuglé qui n'est autre que leur père. La fratrie est à la fois une meute dont le père entretient une concurrence interne malsaine et à la fois d'un amour et d'une solidarité très forte. La tendresse qui unit ces frères est assez touchante, eux qui ont connu une éducation pour le moins totalement tarée, telles des bestiaux de concours qu'on envoie au rodéo.
Iron Claw est autant un film sur l'Amérique profonde et les faux semblants hypocrites de la réussite que sur le phénomène d'emprise d'un paternel buté et violent. Mais la nuance de la mise en scène et du jeu des acteurs apporte une dimension vraiment originale au propos. Une excellente surprise.
La piste aux Lapins :
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