De: George Miller
Forcément, un film de George Miller, réalisateur des Mad Max est ultra attendu d'autant plus qu'avec son Mad Max Fury Road en 2015, il a calmé tout le monde avec un chef d'oeuvre de SF d'une beauté confondante et d'une mise en scène aussi décoiffante que brillante, faisant renaitre son héros iconique comme on ne l’attendait pas du tout.
Mais avant d'en tourner un prequel sur le personnage de Furiosa, qui sortira en 2024 et qu'il a commencé à tourner, le réalisateur de 77 ans nous livre un autre bijou que personne n'attendait.
Les films de fantasy qui parlent d'imaginaire, de comment raconter des histoires, comment faire rêver sont au final pas si fréquents que cela. Si on met de côté les films de super-héros, les dystopies, les space opéra, on se retrouve avec peu de réalisateurs qui abordent ces sujets. On pense évidemment à Tim Burton, Caro et Jeunet ou Guillermo Del Toro pour leur talent visuel et les mondes qu'ils sont capables de créer. Terry Gilliam est lui le maitre incontesté des univers fous bercés de rêves folie et si Brazil et L'armée des 12 singes sont des dystopies très axées sur le cauchemar, Bandits bandits, Les aventures du Baron de Munchausen, Fisher King et même Las Vegas Parano parlent de l'importance de se créer des univers, de raconter des histoire et de pourquoi on les raconte. Le summum fut L'imaginarium du Docteur Parnassus dont le thème était précisément la force des histoires pour lutter contre l'adversité du monde réel et évidemment L'homme qui tua Don Quichotte qui résume à lui seul l'ensemble de ces thématiques qui ont traversé l’œuvre de ce grand maitre, mon réalisateur préféré car j'aime, j'adore m'évader et me raconter des histoires pour romancer le réel et rendre ce dernier plus supportable.
C'est exactement ce que fait George Miller dans "3000 ans à t'attendre" en érudit des contes et légendes en donnant beaucoup de lui-même dans le rôle interprété par l'une des plus grandes actrices au monde, Tilda Swinton. Elle joue une professeur de narratologie qui vit seule et vit très bien car son imaginaire est foisonnant et elle connait tout du processus d'écriture et de déroulement d'une histoire pour raconter et emporter le public. Et pour que son film devienne méta et forme une boucle ludique, il lui fait rencontrer un génie joué par un Idris Elba qui trouve enfin un rôle à la hauteur de son talent. Les deux vont beaucoup échanger et parler dans une chambre d'hôtel car elle ne souhaite pas réaliser de vœux, elle est bien comme cela.
Et c'est plus un exercice psychiatrique sur le Djin, le génie qui va se réaliser, ce dernier racontant son histoire et son passé. On pense immédiatement à la beauté de certains films de Gilliam (Munchausen) ou au magnifique The Fall de Tarsem Singh. Les visuels sont magnifiques, inventifs et vous feront vous évader alors même que vous ne vous accrochez pas à ces personnages très vite dépeints psychologiquement et uniquement au conteur qu'est le Djin. Tout le talent de George Miller dans sa mise en scène de nouveau brillante et diverse, marquée de ruptures et de trouvailles à tout instant, c'est justement de vous emporter d'histoire en histoire et de vous immerger dans ce flot de rêves sans vous perdre et en y aoutant des clins d’œils et doses d'humour qui vont aboutir sur la dernière demi heure en apothéose.
Car le film n'est pas qu'un beau livre d’images et s'avère extrêmement doux et émouvant sur sa conclusion, à l'exact opposé de la furie destructrice des Mad Max. On y voit la rencontre de deux solitudes et c'est d'une universalité qui fait décoller le film très très haut.
Il est extrêmement rare de voir un film sur l'imaginaire aussi brillant, aussi passionnant, dévaler sur nos écrans. C'est un énorme MERCI que je donne à George Miller pour ce conte philosophique qui m'a fait rêver, sourire et qui m'a ému par son romantisme classe et adulte.
Autant de talent et d'intelligence concentrés durant ces deux heures comme ce Djin qui tient dans une petite fiole. Un énorme coup de cœur que ce "3000 ans à t'attendre" qui s'avère être l'un des plus beaux films de l'année.
La piste aux Lapins :
Terrence Malick
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