De: Beale Street
Barry Jenkins revient donc deux ans après son coup d'éclat qu'était le très beau "Moonlight".
Il raconte l'injustice raciale dans le Harlem des années 70 via une histoire d'amour contrariée.
Tish et Fonny s'aiment depuis l'enfance et forment un couple qui ferait craquer un croque mort. Ils sont choupinous et beaux, sympas, et vont se marier. Mais le jeune homme se fait accuser à tord de viol et se voit enfermé et condamné.
L'histoire est au final très simple mais filmée de façon particulière, avec un style assumé, identique à celui de "Moonlight".
Barry Jenkins a une sensibilité incroyable et filme ses personnages à fleur de peau avec une douceur assez déstabilisante. Ils s'expriment limite en chuchotant, la caméra les effleure et le sentiment de cocon, de légèreté de cet amour, se mêle de façon très étrange à un sentiment d'enfermement lié au même procédé.
Les flashs backs et mélanges de présent, passé et futur lui permettent d'instaurer du rythme et du suspens dans une histoire qui normalement n'en aurait strictement aucune.
Surtout il met le doigt sur des discriminations et un racisme ordinaire qui ne semblent pas avoir beaucoup évolué depuis 50 ans, dans cette Amérique Trumpienne plus clivante que jamais, où les blancs qui ne réfléchissent pas sont portés en victimes ou en héros ordinaires auxquels on peut tout excuser de par leur déclassement.
C'est effrayant et pourtant le film s'exprime avec une grande retenue, une finesse qui force le respect. Il manque probablement une dimension ou un message plus fort comme dans "Moonlight". C'est qu'on a très vite compris le concept et passé le respect profond pour la réussite indéniable de l'exercice, on reste un tout petit peu sur sa faim car on aurait aimé voir le réalisateur se dépasser et transformer l'essai sur une fin plus prégnante. Mais "Si Beale Street pouvait parler" reste tout de même un très bon film.
La piste aux Lapins :
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