De Jacques Audiard
Après « Les Olympiades » où il nous parlait de sexe et d'amour chez les jeunes de 20 ans, LE plus grand cinéaste français, Jacques Audiard, va encore nous surprendre.
Il a déjà aligné d'excellents des bijoux avec Un héros très discret, Regardes les Hommes tomber, Sur mes lèvres, De battre mon cœur s'est arrêté, De rouille et d’os ou Les Frères Sisters.
Mais Audiard change à nouveau de style, à 72 ans. Un courage, une curiosité rare chez un artiste de sa tempe que de se remettre en question et ne pas conserver son style, que de passer de problèmes quasiment exclusivement d'hommes à ceux de femmes.
Mieux, il change de style à nouveau après le western et son film sur les amours libres des jeunes des Olympiades. Si Emilia Perez vous emporte dès les premières minutes dans la comédie musicalise alors qu'on est en plein film de narco-trafiquants et si le choix est casse gueule, il fonctionne merveilleusement, porté par une mise en scène d’un brio exemplaire. Et son film ne va pas changer de style pour un autre mais pour une effusion de cinq styles différents : le film sur la transidentité, la comédie musicale, le thriller narco, le film social et la romance à la Pedro Almodovar. C'est absolument brillant de génie et je comprend enthousiasme des critiques cannoises qui déboucha sur le très prestigieux prix du Jury. Les critiques voulaient voir couronné d'une Palme d'Or, une seconde, qui aurait été amplement méritée.
Son actrice Karla Sofía Gascón a quant à elle remporté le prix d’interprétation féminine. Marion Marechal Lepen a failli avoir une crise cardiaque comme nombre de fachos et non seulement çà me met en joie mais c'est ultra mérité. Karla Sofía Gascón est tantôt vulnérable tantôt brutale. Le fait qu'elle ai du rejouer un homme qui chante très bas car elle a perdu sa voix de son autre vie, c'est très fort. Puis quand elle chante avec sa voix d'aujourd'hui, cette dernière est limpide et accompagne la sortie de l'ombre du personnage vers la lumière, comme un pied de nez ultra classe à tous les réactionnaires de la terre. Elle est l’emblème que ce choix d'une difficulté, d'un parcours sans nom, l'a amenée sur les marches de Cannes et désormais dans nos rétines et elle nous prouve qu'elle est une femme à 2000%.
Jacques Audiard distille ainsi l'histoire de cet abandon d'identité et cette transformation, ces douleurs et la mêle à la noirceur du milieu d'où le personnage vient, du mal qu'il a fait pour l’ouvrir à cette vie qu'il/elle n'a jamais eue, enfermé dans son corps d'homme. Non seulement c'est très beau et souvent très émouvant mais en plus le réalisateur n'est ni mièvre ni complice d'excuses pour ces narcos-trafiquants en effaçant le passé.
D’ailleurs le film parle de choix à assumer jusqu'au bout et du danger de regarder en arrière. A ses côtés les formidables Selena Gomez et Zoe Saldaña sont brillantes également . Zoe Saldaña est à mille lieues de ses rôles habituels et livre une superbe performance, notamment de danse. Car Audiard est résolument d'une modernité confondate sur le thème qu'il traite à 72 ans, sur cette prise de risque qu'il prend en mélangeant ces styles si opposés. Mais il montre aussi des chorégreaphies très modernes de danse hurnaine qui dynamisent son film tout comme les touches d'humour très bien vues.
Avec Emilia Perez, le maitre Jacques Audiard, car il mérite qu'on l'appelle ainsi avec telle filmographie et un tel talent de direction d'acteur, de scénariste, de metteur en scène, le maitre donc livre un énorme chef d’œuvre, un film qui fera date et c'est très très mérité !
J'avais un respect immense pour Jacques Audiard, j'ai désormais de l'admiration.
La piste aux Lapins :
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